NOLOT René
René Nolot est né le 8 novembre 1907 à Paris, fils de René et de Marie Louise Rouchon, dans un « milieu petit-bourgeois. Mon père a toujours voté à droite. Il est affilié au Croix de feu fasciste ».
Il va quitter l'école très tôt et aura une rude jeunesse, occupant divers emplois jusqu' à son engagement dans l'armée, en 1927. Il y passera 5 ans et la quittera, comme sergent-chef au 10e Bataillon de Chasseurs. Arrêté le 1er avril 1932, il est condamné, pour refus d'obéissance, par le tribunal militaire de Nancy. Il sera libéré, quelques mois plus tard, en juillet. C'est lors de son engagement militaire, qu'il a commencé à s’intéresser au mouvement ouvrier, influencé par des « camarades du PC ».
Chauffeur mécanicien, il était membre de la CGT. et avait participé aux grèves générales de 1936.
Il a pris part à la journée du 6 février 1934 et en mai de la même année, adhéré au PCF. Il lisait L'Humanité, des livres de Karl Marx et avait « étudié toutes les publications des membres du PC. » Il a écrit des articles dans le journal régional du PCF de Clermont-Ferrand
Avant son départ pour l'Espagne, il demeurait à Paris.
L' Espagne
« Ils sont foutus, tu sais, cela va mal, je ne crois pas que Madrid puisse tenir longtemps », ainsi me parlait mon ami Jacques Adut le 25 décembre1936.
Je ne dormais pas de la nuit, cela me tracassait, quoi tant de sacrifices en vain.
Avec le jour, ma décision était prise, mettre mes services et mes quelques connaissances militaires à la disposition de la République. »
Deux jours plus tard, avec son ami (Jacques ADUT voir sa biographie), il rejoint Perpignan et passe la frontière, au Perthus, le 29 décembre 1936.
« [..]nous arrivons au Perthus. Des garde mobiles s'approchent ;
« Alors les gars, on y va ? Bonne chance, et ils saluent du poing, c'est l'avènement du Front Populaire.
Ce sont les mêmes, qui deux mois plus tard, la frontière étant fermée tireront sur nos copains qui veulent nous rejoindre. » (Op. Cité, p.1)
Après une nuit passée à Figueras, ils arrivent à Albacete pendant un bombardement, puis sont dirigés sur Villanueva de la Jara où pendant 10 jours ils sont « soumis à une instruction intensive ».
L'État-major espagnol, craignant un débarquement sur les côtes levantines, le bataillon d'instruction est envoyé à Murcia et ses environs (El Espinardo) où est installée la 11e BI. A peine installés, les volontaires doivent rejoindre le Bataillon Commune de Paris et après deux jours de train et une halte à Albacete, ils arrivent à Morata de Tajuña (voir article Le front du Jarama). Tout de suite la Brigade monte en ligne. Les combats sont rudes :
« La lutte devant nous fait rage, nous n'avons que nos fusils et nos mitrailleuses, nos tanks brillent par leur absence, et là à 150 m., s'étalent sur toute la plaine une trentaine de tankettes, et derrière comme à la parade, viennent ces Messieurs, colonne par 3. [...]C'est la retraite, mais ordonnée, pas de courette, pas à pas le terrain est cédé, la plaine se couvre de morts et de blessés. » (Op. Cité, p. 16)
C'est là qu'il reçoit le commandement d'une pièce
« Fredo à qui je faisais remarquer qu'il y avait d'autres Camarades plus vieux que moi me répondit : « Ici la capacité passe avant l'ancienneté ». (Op. cité, p.11)
Il participe ensuite à la bataille de Guadalajara, où il est chef de section avec plus de 40 hommes sous ses ordres. Le 11 mars, il est blessé, mais après quelques soins, il refuse d'être hospitalisé. Il prend le commandement de la 4e Cie (de discipline à ce moment là) du Bataillon Commune de Paris.
En mars 1937, sur le front du Jarama, alors que le bataillon Commune de Paris relève le bataillon Dimitroff, il est touché par 24 éclats d'obus. Après un premier « charcutage au poste de classification », il est hospitalisé à Tarancon où il rencontre une jeune infirmière, Riansares de los Rios. Rétabli, il rejoint la 14e BI où il prend le commandement de la Cie de mitrailleuses du 13e Bataillon.
Quatre de ses blessures s'étant rouvertes, il est évacué, à sa demande sur Tarancon « où une charmante personne se chargeait de remplir le rôle d’infirmière. » (Op. Cité, p.33)
Au début de septembre, après un mois de convalescence, il retourne à la brigade où il s'occupe de la formation des recrues « C'est à cette époque que je repartis à Tarancon afin d'unir mon existence à celle qui n'avait pas hésité à donner son sang pour me donner la vie. » (Op. cité, p. 34)
Le 8 octobre, il est rappelé pour prendre le commandement du Bataillon Pierre Brachet, qui va intervenir dans la Bataille de Cuesta de la Reina. La journée du 16 octobre, particulièrement meurtrière, restera gravée dans sa mémoire :
« La nuit tombe. Je parcours le terrain en compagnie de Sabatier (voir la biographie d' Emile SABATIER ) et François. A chaque pas gît un copain. Les brancardiers continuent l'évacuation qui avait été rendue impossible de jour[...]. A voir ce spectacle, à voir tant de bons copains couchés là, dormant leur dernier sommeil les larmes me montent aux yeux. » (Op. Cité, p.38)
Le même jour, il est nommé chef d'opération à l' Etat-Major de la brigade et doit quitter, à regret, le Bataillon.
Le 14 novembre, il remplace, dans ses fonctions, le Commandant Jacquot, chef d'Etat-Major. Du 21 janvier 1938 au 4 février il est nommé au Bataillon Henri Barbusse mais détaché à l'Etat-Major de la Brigade Le 5 février, il prend le commandement de ce Bataillon et participe aux combats lors de l' Offensive franquiste d'Aragon). Arrivé le 13 mars, le 26, près du rio Guadalope, face à Caspe, il est, à nouveau blessé. Evacué sur Tortosa puis sur Benicassim et Denia, il est, à sa demande, transféré à l'hôpital de Tarancon pour être plus prés de la femme qu'il aime. Il s'oppose aux médecins qui veulent lui couper la jambe. Ce n'est que le 9 mai, qu'il est enfin «libéré des médecins».
Rétabli, mais étant dans la zone centrale, coupé des autres BI qui se trouvent dans la zone catalane, il est dirigé sur Valence le 15 mai 1938 et est affecté à la 129e BI. Il y apprend que, pendant sa convalescence, il a été nommé commandant le 28 mars et à ce titre désigné Commandant du centre d'instruction du « campo Anibal » de la brigade. Cette situation ne lui plaisant pas beaucoup, il écrit à André Marty pour être réaffecté à la 14e BI, qui promet de s' occuper de son cas. Rien ne vient et à la disparition du Camp d'instruction, il devient Chef d' État-Major de la 129e BI. Ce n'est que le 27 août qu'il reçoit l'ordre de rejoindre Barcelone. La situation créée par la coupure en deux de l'Espagne républicaine fait qu'il ne peut quitter Valence que le 5 octobre, et enfin rejoindre Barcelone où il apprend que les BI étaient retirées du front. Il se rend, alors, au centre de démobilisation de Calella.
« Pour les Internationaux la guerre était terminée. Ce n'est pas sans regret que nous acceptons cette décision juste du gouvernement Negrin Chacun, après tant de sacrifices aurait désiré rentrer en France avec la victoire, mais le gouvernement de la République en avait décidé autrement. » (Op. Cité, p.56 )
Il avait gravi tous les échelons un à un : de simple soldat, chef de pièce, chef de section, sous-lieutenant, lieutenant le seul rapport trouvé le qualifie de « Lieutenant commandant la CM du 13e Bon « Bon camarade, jeune, sympathique, courageux, se débrouille. », capitaine jusqu'à commandant (mars 1938). Il avait été blessé six fois.
En Espagne, à Tarancon, en mai 37, il avait adhéré au SRI (voir Solidarité) ainsi qu'aux Amigos de la URSS.
A son retour, en janvier 1939, il s'inscrit à l'AVER et entreprend la rédaction de son récit 23 mois au service de l' Espagne Républicaine , probablement, à la demande d'André Marty qui voulait faire une histoire des Brigades Internationales et à qui il rend un vibrant hommage
« [[…] à l'homme qui fut l'organisateur des Brigades Internationales, à l'homme qui fut notre conseiller, notre soutien dans les moments les plus difficiles [...] le héros de la Mer Noire, le soldat de la Liberté. ». (Op. Cité, p. 57)
Dans le préambule de son récit, il précise
« Je n'ai pas l'intention de faire l'histoire de la Révolution de Juillet 1936, mais simplement d'écrire sans parti pris, ce que j'ai vécu pendant mes deux années de luttes pour l'Espagne Républicaine.» (Op. Cité, p.1)
Il sait bien que la lutte n'est pas finie:
« Pour nous la lutte recommence, mais sur un autre plan. En Europe l'horizon s’obscurcit de nouveau. Qu'Hitler et Mussolini sachent bien que ces hommes qui ont infligés, en Espagne tant de coup durs à leurs mercenaires, seront au premier rang si les nécessités l'exigent, pour la défense de leur pays, de la Paix et de la Liberté des démocraties. » (Op. cité, p. 57)
Elu secrétaire de la section du Puy-de-Dôme de l'AVER, il écrit à Philippe Edouard dit Pierre REBIERE pour dénoncer la situation de cette section.
La Résistance
René Nolot a fait partie des F.F.I. d'Auvergne comme agent de liaison.
Divorcé de Riansares de los Rios, il se remariera et exercera divers métiers (chauffeur, mécanicien,...).
Il meurt le 25 novembre 1997. Il repose au cimetière de Jozerand (Puy-de-Dôme).
L'Espagne au cœur
C'était une personne humble et discrète :
« Il ne voulait pas aller aux commémorations. Il me disait que la guerre était la pire des choses. Il me disait qu'après la guerre tout le monde se déclarait résistant. Il préférait rester chez lui. Nous parlions de la guerre d'Espagne. D'ailleurs il m'avait dit qu'il aurait aimé que je me rende à Madrid car il avait entendu dire qu'il y avait un hommage pour les anciens des brigades. J'aurai tellement voulu lui faire plaisir mais, cala m'intimidait beaucoup trop. » (Nathalie Nolot, témoignage)
Ebranlé dans ses convictions, il quitte le PCF, à une date non connue :
« Il s'est senti trahi par les communistes et m'a toujours dit qu'il avait fait la guerre d'Espagne « pour défendre la liberté » (Nathalie Nolot, témoignage)
Sources
Nolot René, 23 mois au service de l'Espagne Républicaine (tapuscrit) - RGASPI (Moscou, référence F.545 Op.3 D. 394) - Nolot Nathalie (petite-fille ), témoignage, courriels, 2021 - RGASPI (Moscou, F.545 Op.6 D.1335) – Eric Panthou (Maitron, article 124130)