LANDRIEUX Pierre dit René
LANDRIEUX Pierre dit René Pierre Landrieux est né le 27 octobre 1913 à Paris 14e. Son père, Lucien Landrieux, était chauffeur, sans opinion. Sa mère, Henriette Thiebaut, laveuse-blanchisseuse, était membre du PCF depuis 1935. Après l’obtention de son Certificat d’Etudes Primaires, il avait fait deux années d’école complémentaire et commerciale rue des Bourdonnais à Paris.
Il commençait à travailler en 1929, mais avec la crise ne trouvait que des petits boulots : aide-livreur, groom ou chasseur dans des grands hôtels parisiens, barman à l’Exposition Coloniale, ou des emplois précaires (maçon, plombier, garçon de café, commis de salle de restaurant…) jusqu’à son départ en 1933 au service militaire, effectué au 155e RAP à Haguenau (Bas-Rhin) dans l’Artillerie. A son retour en 1935, il était chômeur.
Il rejoignit les Jeunesses Communistes du 19e arrondissement de Paris, avant d’adhérer au Parti Communiste début 1936. Devenu immédiatement secrétaire de la cellule de son quartier, rue Petit, il organisa notamment la solidarité avec les grévistes des Travailleurs de l’Industrie du film des Studios des Buttes-Chaumont qui contribueront à le faire embaucher à la fin de la grève comme machiniste aux Studios Gaumont.
Membre de la CGT, il fut élu au Secrétariat de la section syndicale des Studios Gaumont et membre de la Commission Exécutive du Syndicat des Travailleurs de l’Industrie du Film de la région parisienne (Fédération CGT du spectacle). Il sera membre en 1937 de la coopérative de production et de réalisation Ciné-Liberté dirigée par Jean Renoir.
Il lisait "l’Humanité", "les Cahiers du Bolchévisme" et toutes les brochures éditées par le PCF, et a écrit des articles dans la presse syndicale " Le Travailleur du Film ". Il était membre du Secours Rouge et du Mouvement Amsterdam-Pleyel.
Avant son départ pour l’Espagne, il travaillait chez Gaumont Franco-Film Aubert, rue Carducci dans le 19e (350 personnes) où il gagnait environ 420 Francs par semaine. Il vivait maritalement, 19 bis rue du Docteur Potain à Paris (19 e) depuis 1934 avec Angèle Mercier (1909-1943), adhérente du Parti Communiste depuis 1937.
Créateur du comité d’aide à l’Espagne républicaine du 19e arrondissement, il fut sensible à l’appel du secrétaire de sa section communiste qui, lors de l’Offensive franquiste d’Aragon, invitait les militants à assurer la relève des combattants volontaires.
L’Espagne
Venu en Espagne par des moyens illégaux (voir Passage clandestin des Pyrénées) le 29 avril 1938 « en communiste pour défendre la démocratie » avec, dans sa musette, le livre de Malraux L’Espoir offert et dédicacé à son départ par les travailleurs, artistes et techniciens des Studios, il rejoint la base d’Olot le 1er mai 1938.
Il est affecté à la compagnie de mitrailleuses du Bataillon Henri Barbusse de la 14e BI et désigné responsable des activistes (culture, presse et littérature de sa compagnie). Nommé commissaire politique adjoint de sa Compagnie, il se rappellera des années plus tard ("Souvenirs", écrits en 1991) avoir donné dans les tranchées le long de l’Ebre des cours d’alphabétisation aux soldats espagnols, malgré sa méconnaissance de leur langue.
Il se trouve au front du 13 mai au 7 septembre 1938 dans les secteurs d’Aldea et de Tortosa, et participe le 25 juillet à la traversée de l’Ebre (Passage de l'Ebre). Du 7 au 22 septembre, il combat dans le secteur de Gandesa (Bataille de l’Ebre) où il est blessé le 22 septembre au pied droit en défendant une crête dans la sierra Caballs, le jour du retrait effectif des Brigades Internationales décidé par le gouvernement Negrin. Il est soigné dans plusieurs hôpitaux : Reus, Caldes de Malavella – Farnese de la Selva – Mataró.
Dans ses biographies remplies en mai et novembre 1938, il souscrit avec
« enthousiasme à la politique espagnole de Front populaire et souhaite que les partis le formant dans mon pays s’en inspirent. Oui à la politique d’unité de la classe ouvrière devant le fascisme, oui à l’union nationale devant le fascisme ».
Bien qu’arrivé très tard après leur formation, « j’ai été très étonné de la valeur des Brigades au point de vue politique et militaire, en dehors de la valeur de lutte. Quelle pléiade de cadres en serait sortie si leur existence avait été plus grande, n’importe dès le début elles ont été l’exemple qui a permis de forger dans la lutte la magnifique armée populaire. J’ai appris également le rôle important du commissaire politique ».
« Au point de vue politique, j’ai appris à connaître la valeur de l’unité aux dépens du sectarisme. J’ai appris aussi à ne point rebuter la science et la valeur militaire lorsqu’elles se mettent au service du prolétariat en lutte. En ce qui concerne ce que je pourrais apporter aux organisations antifascistes de mon pays, rien de plus que de continuer l’esprit des B.I. dans sa foi, son courage, sa solidarité, sa culture, son unité. »
Quelques appréciations de ses supérieurs : • le responsable du Parti de son bataillon dit qu’il s’acquitte bien de sa tâche, mais manque de confiance en lui. Grosses possibilités et bonnes initiatives. Très sérieux, bon moral, excellent camarade. Arrivé tard en Espagne, a su très bien s’adapter aux problèmes politiques de l’heure.
• du comité de Parti de la Brigade : bonne attitude pendant son séjour au front ,bon militant , très bon camarade.
• de Lucien BIGOURET: bien éduqué politiquement, courageux au front et même téméraire.
Il est rapatrié en France mi-décembre 1938 par train sanitaire.
Le retour
Il se dévoue à la solidarité politique et matérielle avec l’Espagne Républicaine, ainsi qu’aux secours à apporter aux volontaires internationaux rentrés blessés, mutilés, malades, à leurs veuves et orphelins.
De février à août 1939, l’AVER lui confie, ainsi qu’à sa compagne Angèle Mercier, le poste de gardiens de la Maison des Blessés située Cité des Monthiers à Paris 9e (où ils participent au recensement des disparus et au fichier médical des volontaires rentrés en France.
Mobilisé en septembre 1939, il part rejoindre la forteresse de Mützig en Alsace au 155e) Régiment d’Artillerie. Selon son témoignage recueilli par Paloma Fernandez, il va y créer fin 1939 quatre cellules clandestines du PCF de trois membres dans la forteresse et une cellule dans la ville. Mais, le Commandant ayant appris son passé d’ancien combattant de la guerre d’Espagne, des mesures d’isolement sont prises. Prisonnier de guerre de juin 1940 à 1945 en Prusse orientale, il contribue à l’organisation d’actions de résistance. Sa compagne Angèle Mercier entre en Résistance et devient agent de liaison de Georges Vallet et du Colonel Dumont. Arrêtée le 21 décembre 1942, elle est déportée et meurt à Birkenau en avril 1943.
Après la guerre, il se marie le 30 avril 1949 à Montreuil-sous-Bois (Seine) avec Adrienne Repussard. Il était membre de l’AVER et en 2003 participe encore au voyage sur les lieux du Paso del Ebro. Avec sa deuxième épouse, Adrienne, rescapée de Bergen-Belsen, il géra le centre de vacances de Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) à La Barre-de-Monts (Vendée). Il s’installa par la suite dans ce département. Employé communal à Saint-Jean-de-Monts, il fut membre du comité de la fédération du PCF de Vendée de 1961 à 1968. A la fin des années 1990, il était responsable départemental des vétérans du PC en Vendée.
Il décède le 14 juillet 2008 à Machecoul (Loire-Atlantique)
Sources
RGASPI (Moscou, F. 545. Op. 2. D. 303 et Op. 6. D. 1261) - Récit de René Landrieux "avec l’Espoir dans ma musette" 1991- Paloma Fernandez « Le retour et l’action des anciens volontaires français des Brigades internationales en région parisienne de 1937 à 1945 », Mémoire de Maîtrise, 1984, Paris -