Offensive républicaine sur Ségovie

De Encyclopédie : Brigades Internationales,volontaires français et immigrés en Espagne (1936-1939)
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Pour aider le front Nord, gravement menacé par l’armée rebelle, l’état-major républicain va lancer une offensive sur la ville de Ségovie, espérant ainsi attirer les forces franquistes.

« Le secteur choisi se trouve en vieille Castille, dans la sierra de Guadarrama, sur le route de Madrid à Ségovie. Dans cette zone montagneuse, les forces républicaines ont pu conserver, depuis les premiers jours de la rébellion, des positions solides; mais les fascistes s’accrochant au terrain, couvrent à une dizaine de kilomètres au sud-est, le nœud routier de Ségovie, clé de voûte de leur dispositif et quartier général du général Varela. » (‘’Epopée d’Espagne’’, p. 129).

L’offensive comprend deux actions : l’action principale et une action de diversion sur el Alto del Leon, toutes les deux dans la Sierra de Guadarrama.

L’action principale est dirigée par le général Walter, commandant de la 35e Division. Celle-ci est composée de trois brigades, la 14e BI commandée par Jules DUMONT (voir sa biographie), la 69e BM et la 31e BM. « La 14e se trouvait au centre du dispositif, sur la route de Navacerrada à Ségovie. La Bg Duran était à notre gauche et la 31e BM venant de l’est devait déboucher sur La Granja. Le 1e objectif de la 14e était La Granja, par le sud, et le 2e Ségovie. »

La 14e BI est composée des bataillons n° 9 (Commune de Paris commandé par Grillet), n° 10 (Bataillon Domingo Germinal par Guimpel), n° 12 (Bataillon Ralph Fox par RABAH OUSSIDHOUM), et du n° 13 (Bataillon Henri Barbusse par Sagnier) ainsi que de la Compagnie des Pionniers commandée par Vaillant.

Dans la nuit du 29 au 30 mai 1937, la 14e qui se trouvait au repos à Miraflores de la Sierra (Madrid) se transporte sur les positions indiquées.

Pendant 5 ou 6 jours, de terribles combats vont se dérouler autour des hauteurs fortifiées (Cabeza Grande, Matabueyes, Cerro del Puerco) autour du village de Valsain (orthographié Balsain en français). Deux bataillons de la 31e BM pénètrent dans les jardins de La Granja, à quelques kilomètres de Ségovie mais sont repoussés. Le 13e Bataillon, arrivé aux abords de La Granja est également repoussé. Le 3 juin, l’offensive est arrêtée. S’ensuit de violentes contre-attaques fascistes. Le 6 juin, la 14e BI se retire des positions d’attaque.

C’est un échec. Seuls quelques avions ont été retirés du front nord. Les pertes de la 14e sont énormes. Selon un rapport « au cours de cette opération la 14e a perdu plus de 500 hommes, blessés, tués ou disparus. »

Autre répercussion : une vive altercation va opposer le général Walter et le lieutenant-colonel Dumont. Boris Guimpel dans un style... téléphoniste résume ainsi la situation : « Mais les téléphonistes n’ont pas suivi le 13e bon. Oubli de Dumont. D’où quand l’accrochage a commencé et que Dumont a dû rendre compte, incapable de dire où était le 13e. Drame. Dumont refuse l’engueulade, menace de démissionner. ». La 14e BI, de brigade de choc devient une brigade de position et est envoyée sur le Front de Santa Maria de la Alameda.

C’est dans ces lieux de la Sierra de Guadarrama que se déroule Pour qui sonne le glas, le roman d’Ernest Hemingway qui, lui, parle de trahison, les chefs de l’armée fasciste étant au courant de la date du déclenchement de l’offensive, alors qu’une des clés du succès devait être l’attaque surprise.

La photographe Gerda Taro couvrira l’opération.

Sur la controverse, voici le point de vue de Dumont, selon sa petite-fille, Françoise Demougin-Dumont :

"Trois brigades, dont la 14e BI, participent à cette bataille, du 30 mai au 6 juin. En face les défenses fascistes sont solides : armes automatiques, barbelés intacts infranchissables sous le feu des mitrailleuses ennemies, mise en place de blockhaus de ciment. Dumont rend compte très vite, mais en vain, au Général Walter, commandant la Division, des difficultés et de l’imprécision des éléments mis en place. Walter veut absolument prendre Balsain avant l’arrivée, proche, du Général Miaja. Le 30 mai à 12h Dumont à ses hommes : « faites tout ce qui est possible pour poursuivre tous les objectifs qui vous ont été signalés. Faites votre devoir, tout votre devoir. Comme vous l’avez fait toujours ». Dans un rapport établi très vite, le 7 juin 37 à Villalba, Jules Dumont indique qu’il a suivi les ordres donnés malgré les critiques évidentes qu’on pouvait en faire : absence de « plan conjoint de la Division », fractionnement des attaques forcément préjudiciable, multiples ordres et contre-ordres, coordination des tanks, de l’aviation et de l’infanterie contredite par des nouvelles instructions « données trop tard le matin de l’attaque ». Il souligne que la 14e BI a accompli son plan d’action complet, et que son « élan combatif » a été « admirable », qu’elle s’est « superbement comportée ». « Pas un homme n’était resté en arrière. Pas un homme n’avait quitté le front. » Mais il souligne aussi que c’est cette même combativité sans appui qui a été la cause principale des pertes subies par la Brigade, près de 500 hommes blessés, tués ou disparus. Il souligne enfin le comportement brutal de Walter. Un rapport indique que la 14e BI est la seule des trois brigades à s’être « réellement battue ». La rudesse de la bataille força les rebelles à envoyer des troupes et à dégager le Nord, ce qui était un objectif, mais Ségovie n’est pas prise, ce qui était le second objectif. Dans la nuit du 3 au 4 juin la brigade se replie sur ordre puis elle est relevée dans la nuit du 5 juin et prend ses cantonnements à Villalba pour quelques jours. Walter et Dumont ne se croiseront plus. Quand, le 27 juin 1937, l’anniversaire des 6 mois de la Brigade est fêté, avec une attention particulière portée par Jules Dumont, à ceux qui sont tombés. Walter ne s’y rend pas."