EVDOKIMOV Paul
« Je suis né le 1 mars 1904 à Léningrad, fils d’Alexandre Evdokimov et de Varvara Tchekalova ; j’ai deux frères et une sœur ; mes frères s’appellent Nicolas et Boris, tous deux officiers pendant la guerre contre l’Allemagne et ils ont fait la guerre civile dans l’armée blanche. Nicolas a été tué dans le Caucase et Boris vit sans doute quelque part à l’étranger s’il n’est pas mort.
Ma sœur, selon sa dernière lettre reçue en 1924, vivait à Léningrad et travaillait à la poste centrale. Dans cette lettre, elle m’écrivait que ma mère était morte à la stanitsa Kamenskaïa et que mon père vivait à Léningrad.
Avant la Révolution, mon père dirigeait le bureau d’expédition des journaux et des colis du quartier Nikolaevski qui se trouvait dans la 4 rue Rojdestvenskaïa. J’ai été scolarisé à l’école Gourevitch pendant 3 classes.
Deux ou trois mois après la Révolution de février (je ne sais plus exactement quand), à sa demande, mon père fut transféré au bureau de poste de la stanitsa Kamenskaïa (région du Don) 1 et j’étais scolarisé à l’école Kapertchersk.
Six ou sept mois après le début de la guerre civile, Boris est venu en permission (régiment de Drozdovski) et nous avait raconté les horreurs commises par l’Armée rouge. Lorsqu’il a rejoint son régiment, il m’a emmené avec lui – j’avais 14 ans et ne comprenais rien à la vie.
Lorsque l’Armée blanche s’est enfuie de la Russie à Gallipoli, je suis parti avec eux et j’ai passé à Gallipoli deux ou trois mois. Un jour, je me suis enfui à bord d’un navire français pour Marseille où je me suis présenté au consul russe, nommé par le gouvernement de Kerenski, qui m’a envoyé travailler pour un propriétaire chez qui j’ai travaillé pendant un mois, depuis tôt le matin jusqu’à la nuit ; j’y mangeais très mal.
A la fin de ce mois je me suis enfui de Marseille et j’ai dû me cacher pour échapper à la police car je n’avais pas de papiers et je n’avais pas rempli mon contrat d’un an. C’est ainsi que j’ai traîné jusqu’en 1924, affamé, mal vêtu, travaillant de temps en temps sur des bateaux comme charbonnier ou chauffeur et là j’ai commencé à comprendre le combat des ouvriers russes, et là j’ai commencé à haïr tous les aristocrates, les capitalistes et ma famille qui les avait défendus et qui, alors que j’étais encore un gamin, avait voulu m’apprendre à haïr les ouvriers. C’est de ce temps-là que j’ai décidé de racheter ma faute innocente [commise en toute innocence] et de me battre pour la classe ouvrière à la vie à la mort.
En septembre 1924, j’ai réussi, par l’intermédiaire du bureau des travailleurs étrangers, à trouver du travail avec un contrat de manœuvre dans une fonderie de 1000 ouvriers où je gagnais 28 francs par jour à Ugine (Savoie) cette usine employait beaucoup de Russes de l’armée blanche et où ils avaient un grand privilège : l’administration de l’usine leur [aux russes blancs] avait fait construire une église, leur avait donné un local pour leur club monarchiste où ils se réunissaient et discutaient pour savoir comment retourner en Russie en vainqueurs.
J’ai commencé à saboter leur travail et à mener une propagande contre eux et contre l’administration de l’usine qui les laissaient faire ce qu’ils voulaient et dans le même temps punissait les ouvriers des autres nations. J’ai adhéré à la CGTU et distribué des tracts dans l’usine. Jusqu’en 1936, le parti communiste n’y existait pas, malgré les efforts de mes camarades Léon Charrondière et les miens, les ouvriers avaient peur de rejoindre le parti.
C’est seulement après les élections de 1936 que nous avons pu, grâce à notre propagande, les [les ouvriers de l’usine] faire venir à la CGT et après au Parti. C’est à ce moment-là que j’ai été désigné par Léon Charrondière (voir Le Maitron) qui était le président et responsable à la propagande à l’usine pour l’union et pour le Parti ; j’ai rempli cette fonction jusqu’à mon départ pour l’Espagne le 28 octobre 1936.
En octobre, voyant qu’en Espagne le peuple ouvrier avait besoin d’aide et que la police française commençait à me regarder de travers, j’ai obtenu l’autorisation du Parti de partir en Espagne. (Biographie écrite en russe. Traduction faite par Hélène Rol-Tanguy.)
L’Espagne
Paul Evdomikov arrive le 31 octobre 1936 en train pour « lutter contre le fascisme ».
Il est incorporé au Bataillon André Marty de la 12e BI. Il participe à la Bataille de Madrid, à la Défense de Madrid puis sur le Front du Jarama Le 1er mars 1937, lors de la bataille de Guadalajara (mars 1937), il est blessé à la main droite pendant la prise d’Algora. il n’a pas retrouvé l’usage de sa main qu’il demande à retourner au front où il a été blessé encore deux fois.
Le 30 juin 1937, il est nommé sous-lieutenant et le 25 août suivant lieutenant, pour s’être distingué aux combats de Brunete.
Après le Retrait des Brigades Internationales des combats, sur sa fiche de rapatriement, datée du 1er novembre 1938, il est indiqué « bon camarade en dépit de son invalidité à la main droite a voulu retourner au front ». Ces appréciations sont signées de SD (illisible), A.Lipkins et de Martinetti. Le 10 novembre 1938, il est précisé sur son activité de militant « a très bien accompli sa tâche, actif dans le Parti discipliné, sérieux, est un très bon camarade et sa conduite personnelle est très bonne. Son activité de militant du Parti du mois de septembre au mois de novembre a été bonne et sa conduite personnelle très bonne ».
Il figure sur la cartothèque du 31 décembre 1937 sous le numéro 2063 avec mention de son âge (34 ans) et l’appréciation «AF» (voir BAO). Son carnet militaire porte le numéro 75012 et son nom figure sur une note référencée ; « Français- voir ar. Français N.2 p 362 ». Ce document n’a pas été trouvé actuellement.
Résistance
Le Maitron indique que Evdokimov Dionis, Paul durant la Seconde Guerre Mondiale, aurait été capitaine FTPF.
Sources
RGASPI (Moscou, F.545. Op. 6. D.30.D.35 D1038 D.1179 D.1543) - https://maitron.fr/spip.php?article24815, notice EVDOKIMOV Dionis, Paul. .